La Gaîté Lyrique occupée
Tribune

Soutenons la Gaité Lyrique et mettons en place le Grand Paris de l’accueil

20 juin 2026

Après avoir été occupée pendant plusieurs mois par un un collectif de personnes jeunes sans-abri, la Gaité Lyrique est aujourd’hui en difficulté financière. J’appelle la Ville de Paris à apporter son plein soutien à l’établissement, dont l’action des équipes a été exemplaire, en accueillant ces personnes du mieux qu’elle pouvaient et en défendant leur dignité.

Les pertes financières liées à ces cent jours d’occupation, et au manque de solutions de relogement proposées, ne doivent pas incomber à l’équipe de la Gaité Lyrique qui a simplement fait preuve d’humanité.

La Gaité Lyrique incarne la culture telle que nous la voulons : solidaire, humaniste, hospitalière.

Nous devons nous mobiliser pour qu’une telle situation ne se reproduise pas: le 18 mars à l'aube, après 99 jours d'une occupation sans avenir, la police expulsait de la Gaîté lyrique plus de 400 personnes, sur instruction du Préfet de Police de Paris. 400 personnes migrantes, dans des situations administratives très diverses, mais toutes sans toit. Cette éviction sèche, sans hébergement ni accompagnement, a renvoyé ces femmes et hommes à une nouvelle errance dans les rues parisiennes.

Si l'Etat en est le premier responsable, en refusant cyniquement d'assumer sa compétence en matière d'hébergement d'urgence, c'est notre échec collectif, moral et politique, qu'il convient aujourd'hui d'affronter. Gâchis social et culturel ensuite, tant le projet porté depuis deux ans par les 80 salariés de la Gaîté lyrique avait su reconquérir des Parisien.nes de toutes origines, ouvrant de nouveaux horizons sur ce qu'un lieu de culture et de création peut apporter à un quartier et à une cité. Se faisant tour à tour « fabrique de l'époque » pour nous aider à penser les grandes questions de notre temps, lieu de fête et de musique pour présenter le meilleur de la scène créative contemporaine, centre d'accueil et de soin pour accompagner les plus vulnérables, la Gaîté s'affirmait de jour en jour comme un lieu résolument ouvert, au coeur de Paris, bousculant les conventions pour s'ouvrir à tous.tes et se rapprocher de chacun.ne.

Générosité, créativité, solidarité, lucidité… cette Gaîté là est le visage du Paris qu'on aime. Celle d'une culture qui regarde le monde en face, qui vit parmi les citoyen.nes, qui crée pour le futur. S'en priver serait une faute. Nous sommes aujourd'hui nombreux à appeler au sursaut : notre ville doit sauver la Gaîté lyrique !

Mais plus encore, il nous appartient d'éviter qu'un tel drame se répète encore et encore, car d’autres occupations seront en l’état, inéluctables. Plus jamais ces hommes et ces femmes abandonnés à la rue, plus jamais ce sentiment d'impuissance qui ternit nos valeurs. Nous avons le pouvoir de prendre les choses en main. Si les enjeux techniques et de compétences sont complexes, l'horizon est simple : je veux que Paris reste fidèle et fière de sa tradition d'accueil. Combattons les discours de haine, réaffirmons qu'un accueil digne et humain de toutes les personnes qui se trouvent dans notre ville doit être la priorité de chaque Parisien.ne, de chaque élu.e de Paris quel que soit son parti, et bien sûr de toutes les autorités publiques.

Notre devoir, c'est d'arrêter de subir la crise de l'hébergement, épisode après épisode, en mettant dès maintenant dans le débat public des propositions concrètes et structurantes. C'est la seule façon de mettre chacun face à ses responsabilités. Il faut parler de social, il faut parler des personnes migrantes, il faut arrêter d'avoir peur de ces débats. L'épisode de la Gaîté l'a démontré, il vient un moment où ne reste sur la table que des mauvais choix. C'est donc qu'il faut changer la donne. Nous devons confronter l’Etat face à ses manquements et prendre nos responsabilités. Dès ces prochains mois, nous nous mobiliserons pour porter trois mesures fortes.

En premier lieu, nous devons faire advenir le Grand Paris de l'accueil : plutôt que de se rejeter les difficultés ou les responsabilités, je veux ouvrir un débat honnête et transparent avec les collectivités voisines. Nous avons besoin de nouveaux lieux d'hébergement, Paris ne peut pas tous les concentrer. Certaines villes des Hauts-de-Seine ne proposent aujourd’hui aucune place d’hébergement. Maire de Paris, je serai prête à envisager des co-financements dans le cadre d'une politique d'hébergement partagée à l'échelle du Grand Paris.

Ensuite, il est urgent de donner au Maire de Paris la compétence de réquisitionner les bâtiments vides et inoccupés. Des millions de mètres carré de bureaux vides, sans compter les près de 300 000 logements vacants dans notre capitale, les solutions existent pour de l’hébergement temporaire et pérenne.

Enfin, nous avons la chance à Paris de pouvoir compter sur d'exceptionnels services publics municipaux : il faut passer à la vitesse supérieure sur l'accès inconditionnel à ces services, à l'image de ce que fait déjà notre réseau des bibliothèques. Les personnes migrantes peuvent y accéder à l'apprentissage du français, à un poste informatique ou simplement à un environnement stable et sécurisé. Santé, sport, culture… nous sommes plein de ressources et nous pouvons partager ces ressources.

L'occupation de la Gaîté lyrique comme les menaces qui pèsent sur sa survie aujourd'hui ont déjà donné lieu à trop d'instrumentalisations et de tentatives de récupérations partisanes. Il est grand temps de refaire corps, de retrouver la boussole de nos valeurs et de se donner les moyens de tenir notre promesse : plus jamais la Gaîté !

Marion Waller
Candidate à la primaire socialiste pour Paris